Environnement La survie de l'Homme dépendra d'une bonne gestion des eaux de la planète
L'eau ne manquera pas, mais sa répartition obligera à des choix techniques et géopolitiques encore mal appréhendés en l'absence de volonté et de moyens pour prévoir les défis qui se poseront dans 5O ans.
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"On ne manquera jamais d'eau", s'est voulu rassurant mardi Ghislain de Marsily, membre de l'Académie des Sciences, en présentant le rapport "Les eaux continentales" de cet institut, dont il a assuré la direction. Mais son diagnostic sur la gestion de l'eau à long terme est beaucoup plus sévère: il dénonce la faiblesse des données sur les richesses en eau, l'absence de réflexion sur l'avenir des écosystèmes et, surtout, la disponibilité de cet élément pour l'agriculture dans les différentes régions du monde.
Le rapport, qui traite de l'eau dans ses liens avec le climat, l'écologie, la santé, ou son utilisation par l'homme, se proposait de faire un état des lieux et déterminer "les menaces" et les difficultés auxquelles le monde sera confronté dans ce domaine dans 50 ans. Le régime des précipitations sera à terme "beaucoup plus important pour la vie de l'homme que ne le seront les variations de températures", souligne M. de Marsily. "Or, selon lui, on connaît peu de choses sur leur prédiction, les modèles de spatialisation" de ces phénomènes. L'influence des gaz à effet de serre devrait provoquer une pluviosité accrue, "mais on ne sait pas où", déplore-t-il en recommandant un effort de recherches en climatologie (modélisation, paléoclimatologie...).
Le problème, selon ce professeur, est que "le nombre d'observations disponibles dans le monde est en baisse" pour les chercheurs : déficience des pays en développement, confidentialité et données payantes dans les pays développés. L'autre problème majeur qui menace la planète est l'alimentation de 9 milliards d'individus en 2050. Pour le président de l'Académie des Sciences Edouard Brézin, "on ne peut pas se contenter de solutions purement techniques" comme des barrages, l'irrigation ou le dessalement de l'eau. Le secrétaire permanent de l'Académie Jean Dercourt évoque le concept d'"eau virtuelle": "déplacer l'eau est très difficile, déplacer ce que l'eau a permis de cultiver l'est moins".
Il s'agira ainsi de développer les terres exploitables en zones humides, comme en Amérique du Sud, pour nourrir les zones qui ne pourront pas être autosuffisantes. Pour M. de Marsily, la gestion de l'eau au milieu du XXIe siècle "ne pourra plus être nationale". Et "la seule alternative" au développement des terres cultivables sera "d'aller sur des continents humides". Mais on ne connaît pas encore assez bien "la réaction de ces écosystèmes face à l'intervention humaine", regrette-t-il en souhaitant des modèles de la prédiction en écologie. En France-même, a-t-il ajouté, "la réflexion n'est pas assez avancée sur les besoins futurs (et) sur les aménagements à mettre en place".
En conclusion, l'Académie des Sciences affirme ainsi "la nécessité de développer de toute urgence les disciplines écologiques (pour) mieux tirer profit des eaux continentales, clef de voûte de la satisfaction des besoins alimentaires et de l'amélioration de la santé humaine sur la planète".
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